Arwel ne venait guère souvent à la librairie. Quand il avait besoin de consulter un ouvrage il se servait de la bibliothèque universitaire qui possédait presque tout ce qui avait été écrit sur Lux et pour laquelle il avait contribué en partie. Toutefois les nouveaux livres sortaient d’abord en librairie avant d’être racheté par l’université si elle considérait que les ouvrages méritaient de s’y trouver, de ce fait le seul moyen de lire les livres fraîchement sorti étaient de les acheter. Le gallois observait donc le rayon des nouveaux arrivages en se demandant ce qu’il devrait acheter. Il pouvait techniquement se payer tous les nouveaux livres, il n’y en avait pas tant que cela, mais est-ce que cela en valait la peine ? Bien évidemment il ne pouvait réellement juger le contenu d’un livre avant de l’avoir lu alors il décida de les prendre un à un, de s’asseoir dans un coin, et de juger par lui-même si l’ouvrage méritait son attention. Il ne comptait pas tout lire bien sûr, il n’y aurait plus aucun intérêt à les acheter sinon, mais juste assez pour se faire une idée de ce que l’ouvrage valait.

Un autre client pénétra dans la boutique mais Arwel était bien trop occupé pour y prêter attention, le client s’affaira à ses affaires et se retrouva à proximité de l’écrivain sans savoir qui était cet individu qui lisait dans une librairie. Le gallois ne l’aurait sûrement pas remarqué si le livre qu’il lisait le passionnait, hors bien entendu ce n’était pas le cas, il trouvait ce livre chiant à mourir et sa concentration était légère. Cela lui permit de voir en périphérie de son champ de vision une couverture de lire qu’il ne connaissait que trop bien. Un de ses livres. Il détourna légèrement la tête afin de vérifier et en effet l’individu avait bel et bien un de ses livres en main et il semblait décidé à l’acheter. Arwel ne sait pas trop ce qui le prit par la suite. Peut-être était-ce dû à l’ennui et de ce fait à son hyperactivité qui ressortait, ou alors il fut pris d’un excès de témérité.

Le gallois referma le livre qu’il avait dans les mains et tout en restant assis dans son fauteuil jeta un regard cette fois-ci à l’individu et commença à lui parler.

«  Est-ce que vous aimez ces livres ? Je songeais à lire quelque chose de cet auteur mais je ne sais pas si cela en vaut la peine.  »

Pourquoi se faisait-il passer pour un lecteur comme un autre ? Il aurait très bien pu dire à l’individu qu’il était l’auteur de ce livre. Il aurait pu, mais la personne aurait changé de comportement à son égard. Arwel avait envie d’avoir une discussion normal avec quelqu’un sans qu’on ne sache qui il était et puis c’était l’occasion parfaite de savoir ce qu’on pouvait penser de ce qu’il écrivait et de sa personne sans qu’on ne cherche à le flatter.  

Codage par Libella sur Graphiorum

De part les balbutions de l’homme Arwel en déduit que ce n’était pas un de ses lecteurs, ou alors il avait été pris par surprise et ne savait pas comment réagir, tout le monde n’était pas à l’aise avec les autres après tout. Le gallois ne put s’empêcher de trouver le comportement de l’autre homme absolument adorable. Il était embarrassé, pris de court, ne savait pas quoi faire et tentait vainement de répondre quelque chose de satisfaisant, sans doute pour qu’Arwel lui fiche la paix et passe à autre chose. Il pourrait mettre un terme à la conversation ici et laisser le jeune homme en paix mais… L’écrivain était désormais intrigué, il avait envie de parler un peu plus longtemps avec cet homme. Et puis si il était ici c’était qu’il appréciait lire alors cela leur faisait un point en commun et quelque chose à partager.
Alors comme ça il se fiait à l’apparence des livres et aux résumés derrière ? On disait toujours de ne jamais juger un livre par sa couverture mais Arwel devait avouer qu’un livre avec une couverture qui ne lui plaisait pas avait peu de chance d’attirer son attention. Il était lui aussi d’abord attiré par la couverture et ensuite il lisait le résumé afin de voir si l’ouvrage pourrait potentiellement l’intéresser.  Après tout il ne fallait pas perdre le peu de concentration qu’il avait à déchiffrer un livre dont la couverture lui disait qu’il perdait son temps.

«  « On ne doit pas juger un livre à sa couverture. » Avez-vous vous aussi entendu cela quand vous étiez plus jeune ? Il est vrai qu’une couverture ne nous dit pas forcément ce qu’un livre va contenir mais nous sommes naturellement plus attiré vers les livres ayant une apparence qui nous sied.  J’essaye de ne pas m’y arrêter mais les couvertures constituent aussi un élément majeur dans le choix d’un livre pour ma part. »

Et c’est aussi pour cela qu’il prenait grand soin de celles de ses propres ouvrages, même si ce qu’il trouvait plaisant ne l’était pas forcément pour tout le monde, après tout chacun avait ses propres goûts.

«  Si je devais me fier aux couvertures de cet auteur je pense que ses livres ont l’air intéressant. Avez-vous d’autres livres qui vous semblent digne d’intérêt ?  »

Subtile manière de demander à l’homme quels étaient ses goûts et savoir ce qui pouvait potentiellement intéresser ses lecteurs ou futur lecteurs.

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L’homme semblait être au bord du malaise et Arwel s’en voulait de l’accaparer ainsi, il ne voulait pas mettre l’autre individu mal à l’aise ni abuser de lui. Il semblait vouloir s’enfuir à tout prix mais n’osait pas le faire ni dire quoique ce soit au gallois, il vaudrait peut-être mieux dans ce cas laisser l’autre partir. Rien de bon n’arriverait si il effrayait de potentiels lecteurs.

«  J’aime aussi beaucoup le temps de manière général, la mythologie grecque m’intéresse tout particulièrement et c’est pour cela que je voulais lire les livres de cet auteur. Eh bien merci pour votre avis, je pense que j’achèterai ses livres. Ce fut un plaisir de discuter avec vous, je vous souhaite une bonne journée.  »

Arwel décida qu’il valait mieux pour lui de partir d’ici avant de se faire remarquer et décida de prendre un livre au hasard de la pile de ceux qu’il avait voulu essayer, il n’avait pas le temps d’examiner les autres et se devait de partir d’ici au plus vite. Évidemment cela aurait été trop simple si les choses avaient pu s’arrêter ici sans aucun soucis.

«  Oh bonjour monsieur Arwel ! Comment allez-vous aujourd’hui ?  »

Arwel fit une grimace en entendant sa couverture sauter ainsi. L’autre l’avait sûrement entendu et devait maintenant s’être rendu compte qu’il venait de parler avec l’auteur même du livre qu’il avait entre les mains. Lui qui avait voulu être discret, il avait foiré son coup. Étant donné que la chose était faite il fit la conversation avec le vendeur tout en réglant son achat et ne laissa rien paraître de son malaise. Il fallait qu’il garde les apparences après tout.

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Ce qui devait arriver arriva. Un air ébahi, de la surprise, de l’étonnement, une pointe d’admiration, la personne était impressionné par sa grandeur et allait sûrement lui faire une cascade de compliments. S’en suivrait la multitude de questions allant de tel personnage jusqu’à la couleur de ses chaussettes et si il pouvait inclure tel ou tel élément dans son prochain livre sans oublier l’éternel autographe car lorsque l’on rencontrait une célébrité on lui demandait un autographe. Ou un selfie. C’était ce qui se faisait de nos jours apparemment sur Terre même si il n’en avait pas très bien compris le concept. Peut-être que le jeune homme se baladait avec un appareil permettant de le photographier, ou il avait une lueur permettant de le faire ou alors il allait lui faire prendre la pose pour le dessiner.
Ou Arwel s’emballait pour rien comme à son habitude.
La réaction de l’homme allait plutôt dans le sens que l’écrivain avait imaginé, il ne s’était pas jeté sur lui en poussant des cris hystérique (fort heureusement) mais cela ne l’aurait pas trop dérangé à vrai dire. Qui était-il pour dire non à un contact avec un autre homme ? Un écrivain respecté ? Il n’était pas sûr d’avoir une telle réputation mais si il passait pour un pervers cela ferait du mal à la vente de ses livres alors vallait mieux se tenir en place.

«  Aheum eh bien oui… De toute évidence j’ai demandé à la mauvaise personne pour savoir ce que le public pense de moi. Mais je constate que je ne fais pas moins d’effet sur votre personne.  »

Aaaah si il seulement il pouvait faire effet aux hommes de son âge d’une autre manière ! Si tous ses fans étaient à ses pieds pour une autre raison que ses livres… Il s’égarait. Une telle vie ne serait pas enviable du tout à la longue, il avait juste besoin d’un peu de contact avec les autres mais tant qu’il se le refuserait il continuerait d’être frustré et obnubilé par ça. Peut-être devrait-il songer à faire quelque chose à ce propos.
Ou il pouvait aussi ne rien faire et utiliser toute son énergie à écrire. Ça marchait bien en général, au moins il était bon dans un domaine.

«  Ne soyez pas embarrassé, je ne suis qu’un simple être humain tout comme vous. J’ai juste eu un peu plus de chance je suppose.  »

Un simple être humain hein… Pas sûr qu’Arwel pensait vraiment cela de lui mais l’honnêteté n’était pas son fort.  

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Apparemment même quand il voulait bien faire Arwel arrivait quand même à échouer. Loin de lui l’idée de vexer son interlocuteur, il ne voyait même pas ce qu’il avait dit d’offensant. Il n’avait absolument pas suggéré que la vie de l’autre individu était nulle et sans aucun intérêt, il ne se serait jamais permis de dire une chose pareille ! Le penser oui, le dire volontairement non. Et qu’en savait-il ? Il ne connaissait pas cet homme, ils venaient de se rencontrer et n’avaient seulement échangé que quelques mots, comment pourrait-il savoir si sa vie était médiocre et minable ?  Il n’avait aucun moyen de le savoir alors pourquoi se vexer ? Peut-être valait mieux t-il ne rien dire étant donné qu son interlocuteur essayait de changer de sujet.
Il était censé lui conseiller un livre maintenant ? Bien entendu vu qu’il était l’auteur en question on pourrait penser qu’il était le mieux placé pour vendre ses livres mais ce n’était pas du tout le cas. Et encore une fois ne connaissant pas l’individu il ne savait pas ce qui lui plairait, il était donc définitivement mal placé pour l’aider à ce sujet.

«  Eh bien… Cela dépend de vos affinités personnelles. J’ai écrit des livres plutôt académiques en compilant mes connaissances sur la mythologie Grecque et des romans se passant dans cet univers. Si vous n’aimez pas la Grèce Antique peut-être aimerait vous de futurs romans de ma part dans ce cas.  »

Il avait prévu d’écrire un roman policier et un autre d’aventure mais rien n’était encore certain, tant qu’il n’aurait pas fini un livre il ne savait pas ce qui allait se passer. Il savait qu’il voulait s’essayer à d’autres genres toutefois cela ne garantissait pas le fait qu’il allait réussir ce qu’il entreprenait. Il faisait tout pour écrire un bon roman en espérant que ses lecteurs apprécieraient, ils seront ceux qui décideront de la qualité de son roman.   

Codage par Libella sur Graphiorum